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  • Photo du rédacteurLéonard Balme Leygues

La recevabilité d'une requête : équation complexe

Par une ordonnance du 5 janvier 2022, le Conseil d’État a rappelé quelques principes procéduraux sur des questions de recevabilité d'une requête.


Premièrement, le Conseil d’État rappelle que seule une cour administrative d'appel avait à connaître de l'appel du jugement par lequel un tribunal administratif a rejeté une demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales.


Pour des raisons de bonne administration de la justice, il appartient toutefois à la juridiction saisie (ici, le Conseil d’État) de rejeter

les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance, pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ou pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste (article R. 351-4 du CJA)

C'est la deuxième irrecevabilité qu'il vient ici sanctionner, tirée de la tardiveté de l'appel introduit pas moins de 6 ans après notification du jugement attaqué... Bien au-delà du délai de deux mois prescrit par l'article R. 811-2 du CJA donc...


Se prononçant ensuite sur les conclusions tendant au dégrèvement d'office, le Conseil d'Etat rappelle que

le refus d'accorder un dégrèvement sur le fondement de ces dispositions est insusceptible de recours.

C'est la troisième irrecevabilité.


Quatrième et dernière irrecevabilité : les conclusions dirigées contre les décisions portant refus de remise gracieuse relèvent de la compétence du tribunal administratif.


A nouveau, guidé par le principe de bonne administration de la justice, l'article R. 351-1 du CJA prévoit que le Président de la Section du contentieux (ou le magistrat qu'il délègue) règle lui-même la question de la compétence et attribue le jugement de l'affaire à la juridiction qu'il déclare compétente.


Ici, l'affaire est donc renvoyée au tribunal administratif de Toulon.


Reste à savoir si le tribunal considérera que la requête est recevable...


Il est en effet désormais admis qu'en cas de non-respect de l’obligation d’informer le destinataire d’une décision individuelle sur les voies et délais de recours, ou l’absence de preuve qu’une telle information a bien été fournie, le requérant ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d’un délai raisonnable fixé à un an (CE Assemblée, 13 juillet 2016, Czabaj, n° 38776).


Cette solution s'applique également aux décisions implicites de rejet (CE, 18 mars 2019, n° 417270), y compris en cas de rejet d'un recours gracieux (CE, 12 octobre 2020, Société Château Chéri, n° 429185).


Il y a toutefois de bonnes chances d'espérer pour le requérant que son recours sera, cette fois, recevable.


En effet, si cette demande était entachée "d'une irrecevabilité manifeste", le Conseil d'Etat n'aurait pas renvoyé l'affaire au tribunal administratif de Toulon : il aurait à nouveau fait usage du dispositif de l'article R. 351-4 du code de justice administrative et rejeté les conclusions.


Et la règle de la jurisprudence Czabaj ne vaut, en matière de rejet d'un recours gracieux, qu'à condition que le demandeur ait été dûment informé de la décision, ce qui suppose:


soit que l'intéressé a été clairement informé des conditions de naissance d'un refus implicite de son recours gracieux,
soit que la décision prise sur ce recours a par la suite été expressément mentionnée au cours de ses échanges avec l'administration (CE, 12 octobre 2020, Société Château Chéri, n° 429185).

La décision commentée : CE, ord., 3 janvier 2022, n° 457666

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